Algérie: les femmes abandonnées par leurs maris en cas de mastectomie

28 janvier 2019 à 21h46 par Feiza Ben Mohamed

Crédit : AFP

De nombreuses femmes algériennes rapportent avoir été abandonnées par leurs époux après une mastectomie.


Le sujet reste relativement tabou dans le pays. Chaque année, nombre de femmes atteintes d’un cancer du sein sont contraintes de subir une ablation pour espérer guérir.


Au delà de la terrible épreuve que représente un combat contre le cancer, beaucoup d’entre elles ont à subir l’abandon de leurs époux.


Souvent considérée comme une diminution de la féminité, la mastectomie reste une intervention aux lourdes conséquences dans la vie des femmes. 


Selon Farid Chebal, professeur de génétique du cancer à l’université d’Alger, il y aurait près de 10 000 cas de cancer du sein recensés chaque année en Algérie dont 3500 conduirait au décès de la patiente. 


« Le cancer ? C’est rien comparé au fait d’être rejetée après 18 ans de mariage » explique Linda, l’une d’entre elles, dans une interview accordée à l’AFP.


Elle raconte avoir été surnommée « demie-femme » par son ex-mari après sa mastectomie dans un pays où cette maladie reste « honteuse ». 


Saïda, 55 ans, a elle aussi vécu une histoire similaire. Elle déplore « on s’était connus à la fac, nous avions fait un mariage d’amour. Il participait même aux manifs pour les droits des femmes, mais n’a pas hésité une seconde à me jeter comme de la merde ».


Même schéma pour Saida qui explique à l’AFP avoir « préféré rompre avant que lui ne le fasse » car sa « belle-famille ne voulait plus » d’elle. Cette enseignante dit n’avoir eu « ni la force ni l’envie de lutter ».


Dans une société conservatrice, ces femmes ont à subir le fait « d’être amputées d’une partie de leur corps qui symbolise la féminité » et ne se sentent « plus en conformité avec l’image de la femme », analyse la sociologue Yamina Rahou.


De son côté, le théologien Kamel Chekatt est catégorique: « ce n’est pas un problème de religion mais d’éducation ». 


Si certains hôpitaux algériens proposent des reconstructions mammaires gratuites, ils sont souvent saturés en raison de la forte demande. 


La seule solution reste l’accès aux cliniques privées qui permettent un délai moins long mais demeurent inaccessibles pour nombre d’algériennes issues de milieux populaires ou défavorisés. 



Vidéo: AJ+ français