L'Oeil d'Élise _ Sexualité et Islam #2

Sexualité et islam. C’est un sujet dont s’emparent régulièrement les islamophobes pour répandre l’idée d’un homme arabe arriéré et prisonnier de ses pulsions ainsi que d’une femme toujours proie et victime. En janvier dernier, Bernard de la Villardière exploitait lui aussi le filon en traitant de « l’amour et du sexe au Maghreb » dans son émission « Enquête exclusive ». 

Mais si enquête ou analyse il doit y avoir, c’est bien d’abord de la part des Maghrébins et/ou musulmans eux-mêmes. 

 

Mais force est de constater que le sujet reste tabou. Deux évènements qui ont marqué l’année 2018 et 2019 méritent qu’on s’y attarde à nouveau. Tout d’abord encore et encore l’affaire Tariq Ramadan. L’idée n’est pas de discuter de l’innocence de l’islamologue. Le problème est, que dans les commentaires autour de cette affaire, des hommes ont eu tendance à considérer directement les victimes de violences sexuelles comme des menteuses, cherchant à faire du tort à la communauté musulmane. D’autres ont dit que ces femmes finalement, l’avaient bien cherché. Une excuse aussi pitoyable que celle que l’on trouve pour dire qu’une femme violée n’avait pas qu’à sortir en jupe. 

Et beaucoup ont préféré dépenser leur énergie à défendre coûte que coûte Tariq Ramadan plutôt qu’à se poser des questions sur les racines du problème de l’adultère, un fait reconnu par l’intéressé. Ou plutôt encore que de s’interroger sur le consentement ou sur les devoirs et droits qui reviennent aussi bien à l’homme qu’à la femme dans le domaine de la sexualité.

Écoutez Parler Femmes, le magazine des femmes de France et d'ailleurs, préparé et présenté par Hanan Zahouani, tous les dimanches de 16h à 18h en direct sur les ondes de France Maghreb2 ou sur notre application à télécharger sur play store. Retrouvez l'intégralité des podcasts Parler Femmes sur le www.francemaghreb2.fr tous les dimanches à partir de 18h30.

L’occasion aurait pourtant été bonne de parler de la femme, encore souvent, et j’insiste dans toutes les sociétés, encore perçue comme un objet sexuel. Car la pornographie qui propage cette idée, concerne tout autant les maghrébins et les musulmans et n’épargne malheureusement pas les jeunes de la communauté. 

Le mouvement #MeToo était également le moment opportun de parler de sexualité. Mais quand des musulmanes sur Twitter ont osé parler d’attouchements lors de leur pèlerinage à la Mecque, là encore on les a accusé de salir l’Islam. Les faits ont tout de suite été minimisés, et le dossier aussitôt refermé.

Mais si l’on ne veut pas parler des problèmes autour du sexe ni de violences sexuelles, alors discutons en au moins objectivement.

Aujourd’hui, il est urgent que l’on aborde le thème de la sexualité à la mosquée, comme le fait régulièrement la sexologue Nadia El Bouga lors d’ateliers. Mais il en faut d’autres des Nadia, et pourquoi pas des hommes aussi. 

Il faut également éduquer les jeunes à ces questions, en évitant de tomber dans l’écueil du licite et de l’illicite uniquement. C’est important mais il faut aussi donner les clés à chacun pour atteindre une sexualité épanouie. Vulgariser la chose, sans être vulgaire.

Je tiens à ajouter encore deux précisions. D’abord que le sujet touche aussi les convertis et qu’il ne se limite pas aux musulmans d’origine maghrébine, auxquels je ne jette certainement pas la pierre. Et enfin que le tabou autour de la sexualité doit être levé non pas pour dresser les hommes musulmans contre les femmes musulmanes mais pour tendre vers une sexualité davantage heureuse et respectueuse.

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