Méditerranée : cultiver pour reconstruire le lien

De Tanger à Beyrouth, de Marseille à Tunis, la Méditerranée demeure un carrefour de savoirs, de cultures et d’échanges. Depuis des siècles, ses rives apprennent à cohabiter et partager. Aujourd’hui, face aux bouleversements écologiques et sociaux, une idée ancestrale retrouve son actualité : et si changer le monde commençait, tout simplement, par cultiver son jardin ?

Modifié : 10 novembre 2025 à 18h34 par Latifa Loucham

Une traversée méditerranéenne

Un carrefour (du) vivant

Des oliviers centenaires de Tunisie aux figuiers du Rif, des huertas de Valence et potagers urbains de Barcelone aux toits cultivés d’Alger, la Méditerranée incarne depuis des siècles un lien étroit entre l’homme et la terre. Cette région, où l’agriculture de proximité continue de façonner les paysages et les modes de vie, perpétue un savoir-faire transmis malgré l’urbanisation rapide et le changement climatique.

Ici, les civilisations ont échangé des graines, des techniques, des saveurs et des récits : un commerce de cultures qui, souvent, a résisté aux frontières et aux conflits.

Mais cette mer, symbole d’abondance et de dialogue, porte les marques de ses déséquilibres : pollution chronique, raréfaction de l’eau, pression démographique, urbanisation non maîtrisée et tensions migratoires. Dans cet espace à la fois dense et vulnérable, chaque initiative locale, agricole, écologique ou sociale, contribue à repenser le rapport entre nature et société.

Des graines d’avenir

À Ghardaïa, au cœur du Sahara, le parc Tafilelt Tejdit expérimente une éco-ville bâtie en matériaux locaux, où les habitants recréent des jardins communautaires dans le désert.
À Barcelone, le programme Superilles transforme les quartiers en espaces piétons et végétalisés, redonnant place au vivant au cœur de la ville.
À Beyrouth, l’initiative Beirut RiverLESS a converti une friche industrielle en parc écologique et artistique, offrant un souffle vert à une capitale meurtrie.
À Sfax et à Tanger, des écoles développent des jardins pédagogiques pour sensibiliser les enfants à la culture, au compost et à la gestion de l’eau.
En Provence, des collectifs d’agriculteurs réinvestissent des terres abandonnées grâce à l’agroforesterie, associant oliviers, céréales et biodiversité.

Partout autour de la Méditerranée, ces projets esquissent une écologie du quotidien : concrète, collective et ancrée dans les territoires.

Cultiver, un geste essentiel

« Cultiver son jardin », écrivait Voltaire, c’est agir à son échelle, là où l’on vit. Dans le contexte méditerranéen, ce geste prend aujourd’hui une dimension nouvelle : celle d’une pratique ancrée, concrète, qui relie l’individu à son environnement.

Cultiver, c’est maintenir un lien avec la terre, le climat et le cycle des saisons. C’est aussi réintroduire du vivant dans des espaces souvent marqués par la densité urbaine ou la pression économique.

Sur les rives de la Méditerranée, de nombreuses initiatives montrent que cette attention portée au sol, à l’eau et à la biodiversité contribue à retisser des liens sociaux et à rééquilibrer les territoires.

Les peuples méditerranéens partagent un même défi : préserver les conditions de vie dans un espace à la fois fertile et fragile.

Série « Cultivons notre jardin »

Une création éditoriale et sonore sous la direction de Latifa Loucham pour Radio France Maghreb 2.
Une exploration de l’écologie humaine et du quotidien, à hauteur d’homme et de territoire.

À découvrir prochainement : les voix de celles et ceux qui sèment, partagent et font grandir le vivant autour de la Méditerranée.
Latifa Loucham et Tarek Mami