Coupe du monde au Qatar : la France entre hypocrisie et danse des canards

En France, dans les bals populaires, les mariages et autres campings, les animateurs invitent le petit peuple à la danse des canards. Et si cette tradition se perd parmi les nouvelles générations qui la considèrent comme vieillotte, ringarde et clairement dépassée, la classe politique perpétue cette tradition dans une cacophonie visible, amplifiée par la presse mainstream, à l’insu de son propre plein gré, qui n’y oppose aucune critique.

9 octobre 2022 à 11h23 par Tarek MAMI

Qatar Stade
Qatar Stade
Crédit : FM2

Cacophonie, et danse des canards

La cacophonie oppose des maires pro-boycott, dont l’immense majorité est plutôt de gauche (prononcez Gôche ou Gooche), autopromus supporters officiels du Boycott de la coupe du monde de Football au Qatar, au gouvernement pour ne pas dire l’État.

Hypocrisie et danse des canards

À moins de deux mois de la prochaine coupe du monde de football au Qatar, la première en dehors du continent européen et de l’Amérique du Sud, et plus précisément la première dans un pays arabe et musulman, la France officielle s’entre-déchire entre la France “d’en haut” et la France “d’en bas”, pour reprendre l’expression de l’ancien premier ministre français Jean Pierre Raffarin (2002 -2005).   

Côté France “d’en haut” et gouvernement

Dans ses relations diplomatiques avec le Qatar, initiés par le Président Nicolas Sarkozy, et consolidés par ses successeurs, le gouvernement reste droit dans ses bottes, pour reprendre la célèbre phrase de l’ancien premier ministre français Alain Juppé (1995- 1977). Le Président de la République, Emmanuel Macron envoie des gendarmes et des policiers comme stadiers au Qatar. Au nombre de 220 personnes les sécuritaires français accompagnés de dix chiens sont mandatés pour aider la sécurité qatarienne dans la sécurisation des huit stades de Doha, où se déroulera la compétition. Sauf que … cette information, somme toute banale et usuelle dans ce genre d’occasion entre pays qui entretiennent des relations de confiance et d’amitiés, comme c’est le cas de la France et du Qatar, n’est pas annoncée par l’Élysée, mais révélée par une “fuite -indiscrétion” du journal satirique “Le Canard enchaîné”, du 5 octobre 2022. Ce journal, surnommé Palmipède par ses adeptes qui l’attendent avec gourmandise, tous les mercredis pour le lecteur citoyen lambda, et dès mardi soir pour les journalistes  pour préparer leurs capsules du lendemain matin,  et par les professionnels de la politique pour savoir si eux-mêmes et lequel de leurs collègues sont “mis à l’honneur » par l’exposition de ses frasques et autres délicatesses avec la loi et quelques fois les excès qui même s’ils ne sont pas illégaux  heurtent l’opinion publique.  Et le Canard enchainé d’enfoncer le clou de cette information révélation “fuite -indiscrétion” sur la bonne coopération entre la France et le Qatar et d’ajouter une louche, sa marque de fabrique. Il révèle que le renfort humain et canin français sera entièrement pris en charge non pas par les organisateurs de la coupe du monde de football, mais par l’État du Qatar, et plus précisément par l’Émir du Qatar himself qui versera à ces hommes une prime conséquente. Reste au moins deux questions en suspens.

Que cible le Canard enchainé ?

La première question est à qui cette prime sera versé ? Directement aux 220 membres de la délégation sécuritaire française ou à leur ministère ?

La deuxième question contre qui les flèches du journal sont tirés. Contre le Qatar à qui le Canard réserve un numéro spécial avec des critiques acerbes, participant ainsi, avec la meute à la campagne orchestrée contre le Qatar, dont le timing intrigue, pose question et apparaît plus que suspect. Ou contre le gouvernement français qui agit en toute discrétion et n’assume pas publiquement sa politique étrangère en matière sécuritaire avec le Qatar à l’occasion du mondial de football. 

On a connu la France plus franche et plus volontariste dans sa communication publique dans le soutien sécuritaire de ses partenaires des pays du golfe comme lors de l’opération de l’assaut de la Mecque, en 1979, par le commandant Baril et ses hommes du GIGN, troupe d’élite de la gendarmerie française pour mettre fin à la prise en otage de centaines de pèlerins. 

Côté France “d’en bas” et mairies pro-boycott

C’est plutôt le bal des hypocrites que certains maires, des grandes villes, une dizaine sur les trente-six mil communes que compte la France, entament en fanfare, toute honte bue, une « opération de Boycott du mondial de football au Qatar », (20 novembre - 18 décembre), Les maires, notamment, de Paris, Lille, Marseille, Bordeaux, Strasbourg, Reims, Brest, Nancy, et Rodez, dirigés par des élus membres du Parti socialiste et du parti écologiste, ont décidés de brûler, aujourd’hui, ce qu’ils ont vénérés hier, eux-mêmes ou leurs prédécesseurs. Contrairement à une tradition française bien établie, pour les phases finales de la coupe du monde, qui voit toutes les villes installer des fan-zones avec des écrans géants, pour permettre aux supporters de suivre la compétition de leur équipe nationale et leurs joueurs préférés, pour le Qatar, c’est niet. 

Ces édiles prétendent passer leur petit jeu politicien, et leurs idées opportunistes du moment, pour l’expression revendiquée, haut et fort, par leurs administrés, en omettant, toutefois, de recueillir leurs opinions sur cette question du boycott de la coupe du monde de football, au Qatar. L’opinion de ceux qui n’ont pas votés pour eux mais contre eux. Mais aussi, et surtout, l’opinion de la large frange des citoyens électeurs amateurs du foot et qui ont boycottés les urnes lors des dernières élections municipales, qui ont installées ces élus dans les fauteuils des maires. Ni consultation populaire, ni referendum local, dont certains se disent pourtant partisans. Cette croisade, hypocrite, au nom d’un « boycott pragmatique » s’habille, comme toujours, lors des démarches de politique politicienne, d’ornements de « valeurs universelles », entre sauvegarde des droits humains et préservation de l’environnement. Les phrases grandiloquentes sont lâchées.

Volet sauvegarde des droits humains

Le discours des élus pro-boycott du Qatar est tout simplement surréaliste. Il relève manifestement plus de l’opportunisme politique que du réalisme pragmatique.  C’est le maire de Strasbourg qui ouvre le bal. Il claironne    " il est impossible pour nous de ne pas entendre les nombreuses alertes des ONG qui dénoncent les abus et l'exploitation des travailleurs immigrés". Et d’enchainer "Strasbourg, capitale européenne, siège de la Cour européenne des droits de l'Homme, ne peut décemment cautionner ces maltraitances". Le maire de Marseille surenchérit sur ce chapitre : "Cette compétition s'est progressivement transformée en catastrophe humaine et environnementale, incompatible avec les valeurs que nous voulons voir portées au travers du sport et notamment du football". Le maire de Bordeaux, de son côté, assène « J’aurais vraiment l'impression, si Bordeaux accueillait ces fan-zones, d'être complices" de "cette manifestation sportive qui représente toutes les aberrations humanitaires, écologiques et sportives". Tous ces maires, décident donc de priver leurs villes d'une fête géante autour du football au nom traitement inhumain des travailleurs immigrés et les décès survenus lors de la construction des huit stades du Mondial, depuis l'attribution de la Coupe du monde 2022 au Qatar en 2010, qui justifie ce boycott.

Volet écologie

Le maire de Nancy pointe le "décalage" de "l'usage de stades climatisés durant cette Coupe du monde (...) avec les enjeux de transition écologique", et d’appeler la FIFA à " revoir sérieusement les règles d'attribution des prochaines Coupes du monde" afin "d'intégrer ces enjeux" de "sobriété" et de "respect du droit humain". Le maire de Reims saisit le nouveau discours sur la sobriété pour clamer « à l'heure où les pouvoirs publics demandent (...) de réduire (la) consommation d'énergies, de telles installations susciteraient une incompréhension légitime (...) pour l'un des évènements les plus controversés de l'histoire du sport". 

Tonnerre de Brest

Le cas de la ville de Brest déshabille l’argumentation stratosphérique avancée par tous ces maires, et met à nu l’hypocrisie de ce stratagème. Son maire ne craint pas le ridicule. Tout en soutenant le boycott du mondial du Qatar il déclare devant la presse que « la diffusion sur des écrans n'a pas un impact écologique énorme, même si cela a un coût, pour les écrans ou le barriérage". Cerise sur le gâteau, ledit maire annonce que sa mairie pourrait diffuser sur écrans géants les matchs de la Coupe du monde de rugby, qui sera organisée en France, en2023.

(https://www.letelegramme.fr/finistere/brest/a-brest-pas-d-ecrans-geants-pendant-la-coupe-du-monde-de-football-au-qatar-04-10-2022-13192590.php )

Et tant pis pour les supporters des Bleus

Le hic et le hoc est que les bleus, surnom de l’équipe nationale de football participe au mondial de football au Qatar et n’auront pas droit au soutien populaire et festif de leurs supporter et soutien “restés au pays”, même s’ils accèdent à la finale. 

 

 

QATAR
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Crédit : FM2